Un nouveau souffle pour l’agroforesterie en France

Le lundi 1er décembre 2014, une journée nationale sur l’agroforesterie (AF) a été organisée à l’initiative du ministère, en collaboration avec l’assemblée permanente des chambres d’agriculture, l’association des régions de France et les associations françaises d’AF. Bio Consom’acteurs y a participé, et partage avec vous ce qui s’y est dit !

Rappelons tout d’abord deux éléments. Premièrement, l’arbre était présent dans les espaces agricoles français il y a encore peu de temps, de nombreuses régions ayant gardé leurs traditions bocagères jusque dans les années 70. L’utilisation des tracteurs et autres engins agricoles est alors devenue massive et il s’agissait de faire place nette pour en faciliter le passage. Deuxièmement, l’arbre agroforestier, – c’est-à-dire l’arbre placé dans un système agricole – s’adapte et bénéficie à différents contextes : le maraîchage et la culture céréalière bien entendu, mais aussi la viticulture et l’élevage, de la production de lait à celle d’œufs biologiques… comme en ont témoigné les éleveurs et agriculteurs présents lors ce cette journée.

L’arbre et les haies se font de plus en plus indispensables à l’agriculture : l’augmentation progressive des températures et de l’occurrence d’événements climatiques extrêmes portent atteinte à la pérennité de notre modèle agricole. L’agroforesterie est un moyen efficace pour modérer les aléas climatiques et les variations de productivité du secteur agricole français.

Un atout pour lutter contre l’effet de serre
Grâce à son ombre et à l’humidité qu’il génère, l’arbre permet de protéger les cultures des rayons trop ardents du soleil, diminuant brûlures et risques d’incendie. Son réseau racinaire facilite quant à lui l’infiltration de l’eau en profondeur sur la parcelle, prévenant les inondations. Coupe-vent, facilitant l’accumulation de matière organique au sol, l’arbre permet de préserver la couche d’humus et d’éviter l’érosion des sols. Arbres et haies fournissent aussi un abri pour le bétail et pour de nombreuses espèces : ils sont à l’origine du développement d’écosystèmes et favorisent la biodiversité.

L’arbre est également un atout majeur dans la lutte contre l’effet de serre, parce qu’il capte le carbone de l’air et produit du dioxygène. La croissance de l’agroforesterie à plus grande échelle permettrait de parer à la déforestation en cours sur notre planète, donc de lutter contre le réchauffement climatique. L’agroforesterie pourrait être aussi un moteur pour l’agriculture biologique, parce qu’elle relocalise sur les parcelles des ressources (gratuites et renouvelables) nécessaires à la fertilisation organique des sols et à la lutte intégrée contre les espèces prédatrices des cultures.

Des territoires qui se lancent
Ces avantages ne sont cependant pas pris en compte par la logique productiviste de Bruxelles, calquée sur le modèle des grandes plaines américaines: les percevant comme inutiles voire encombrants, les réglementations communautaires pénalisent aujourd’hui encore la présence d’arbres agroforestiers. Ainsi, les exploitations en AF sont souvent privées des aides du premier pilier de la PAC, alors même que les récentes mesures de verdissement tendent à favoriser une approche plus écosystémique de l’agriculture. La politique agricole commune manque donc actuellement de cohérence…
Clôturant cette journée, le ministre de l’Agriculture a cependant affirmé que l’agroforesterie faisait bel et bien partie du projet agroécologique français et que le ministère veillera à ce que la transposition des mesures européennes n’entrave pas son bon développement.

Malgré le manque d’encouragements institutionnels, certains acteurs territoriaux prennent les devants. La région Poitou-Charentes a ainsi lancé dès 2006 un programme expérimental de développement de l’AF, en vertu duquel 5 000 arbres ont été plantés sur 90 hectares de terres agricoles, programme élargi en 2009 à 240 hectares.

Relancer l’arbre auprès des paysans
Il s’agit à présent de mutualiser les connaissances et savoir-faire de ces pionniers. Mais aussi des différents membres du tissu associatif – Association française d’agroforesterie et Association française arbres et haies champêtres -, dont le mariage et la réunion en une fédération nationale a été annoncé au cours de la journée.

Avec la création l’été dernier d’un réseau mixte technologique (RMT) dédié à l’AF et la mise en place d’une mission ministérielle chargée d’identifier les freins et les leviers pour le développement de l’AF en France, le ministère a voulu appuyer ces premières démarches. Il reste effectivement beaucoup à faire, que ce soit en matière de communication pour revaloriser l’arbre auprès des paysans, qu’en matière de recherche et de formation des conseillers agricoles, dont un infime minorité est aujourd’hui en mesure d’apporter un soutien technique sur l’intégration des arbres au sein des parcelles.
Mais la dynamique est bel et bien lancée, et elle réunit les différents acteurs du réseau national pour l’AF (agriculteurs, tissu associatif, lycées agricoles, institutions locales et ministère) dans une réelle optique de coopération, au delà des clivages habituels !
 

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