La bio : des emplois et des valeurs

Parce qu’elle fait travailler plus de main-d’œuvre que l’agriculture conventionnelle, l’agriculture biologique offre davantage de  perspectives d’emplois… le sens en plus.

L’agriculture biologique cultive l’emploi. Non seulement chez les agriculteurs : une exploitation en bio emploierait 2,4 unités de travail annuel (UTA), contre seulement 1,5 UTA en agriculture conventionnelle. Même constat en termes de surfaces: une exploitation en bio emploierait 0,045 UTA par hectare contre 0,028 en AC, selon une note de synthèse de l’Inra parue mi-octobre. Mais l’impact sur l’emploi de la bio se répercute au-delà du champ de blé : sur les activités de transformation et de vente directe, qui nécessitent de la main d’œuvre ; mais aussi sur les activités de recherche et développement et de formation en agriculture bio (voir Installation en agriculture: couvez-vous bien!). C’est ce que montrent des études internationales relevées par l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) dans un rapport de 2012. Autres emplois générés par la bio : la fabrication de nouveaux systèmes agricoles mécanisés ainsi que la construction et la maintenance de nouvelles infrastructures locales et rurales. Selon une étude rapportée par le même rapport, 40 000 emplois nets seraient créés si l’Union européenne convertissaient  10% de ses systèmes agricoles en bio.

Ce surcroît d’emploi varie fortement selon les productions. La note de synthèse de l’Inra suggère que plus une activité agricole est gourmande en pesticides et en engrais de synthèse lorsqu’elle est en conventionnel, plus elle réclame de travail humain lorsqu’elle passe en bio. C’est ainsi que les vignes et les fruits, très gourmands en intrants chimiques en conventionnel, demandent beaucoup plus de travail lorsqu’ils passent en bio. Ce qui semble logique. Du coup, le surcroît d’emploi serait moins évident au sein des grandes cultures annuelles et des élevages de chèvres, de moutons et de vaches, estime l’Inra. Qui, même s’il reconnaît le manque de données général concernant l’impact de l’agriculture bio sur le travail, parle d’un « écart entre le nombre d’emplois en agriculture bio et en agriculture conventionnelle légèrement défavorable à l’AB » en maraîchage, en horticulture et en élevage de porcs, volailles, lapins, chevaux et autres animaux non ruminants. Des exploitations « fortement intensives en travail, en bio comme en conventionnel », explique l’Inra. Sauf qu’en bio, on retrouve du sens à son travail.

Travail et satisfaction accrus

En bio, on bosse plus dur qu’en conventionnel. Non seulement en termes de volume de travail, qu’il soit quotidien, mensuel ou annuel. Mais aussi en termes de technicité, de complexité « voire de pénibilité », remarque l’Inra. Pas étonnant, puisque l’agroécologie est une science relativement récente, qui se base à la fois sur les savoirs ancestraux agricoles, et sur des connaissances actuelles et sans cesse renouvelées en écologie, hydrologie, science des sols, botanique, etc. L’épandage mécanique d’engrais et de pesticides conventionnels laisse place à la réflexion, aux tests et aux échecs, à l’observation des animaux, du sol et des plantes. L’agriculteur bio apprend de nouvelles techniques et savoir-faire. La récompense : une plus grande satisfaction.

Pourquoi la bio rend-elle plus heureux ? On peut citer la maîtrise de l’ensemble des cycles de production, davantage d’autonomie, l’accomplissement personnel dans le travail, la diversité des activités, le contact direct avec les consommateurs. Mais aussi une reconnaissance symbolique et sociale (dans les valeurs portées par la bio), ainsi que matérielle – l’Inra rappelle d’ailleurs une « rentabilité économique au moins égale en bio et en conventionnel ». En somme, le travailleur en bio retrouverait l’intérêt du métier d’agriculteur (voir Bio et autonome: le chamboulement d’une ferme conventionnelle). Rien de moins que ça.

Hors du champ, la bio contribue à la dynamisation économique et sociale des campagnes : emplois directs, indirects et induits et par les relations de proximité nouées entre producteurs et consommateurs, via les activités de vente directe ou en circuits courts, lesquelles sont « plus fréquentes en bio qu’en conventionnel», reconnaît l’Inra. Autre atout pour le territoire rural : la jeunesse, la meilleure formation des paysans en bio, et des installations souvent hors cadre familial. Ce dernier point en particulier permet une « revitalisation et un renouvellement de la population agricole », d’après l’Inra.

Emplois plus intenses mais plus satisfaisants, découverte de nouveaux savoir-faire, attrait économique dans la mesure où la demande des consommateurs en produits bio ne faiblit pas : le secteur de l’agriculture biologique ne connaît(ra?) pas la crise.

Sources :
Inra, note de synthèse « Vers des agricultures à hautes performances », 2013
Fao, « Green jobs for a revitalised food and agriculture sector», 2012
Programme des Nations unies pour l’environnement « Green jobs, towards decent work in a sustainable, low-carbon world », 2008
Agence bio: Chiffres clefs 2012

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