Changer d’agriculture n’est-il pas l’acte primordial de l’éclosion d’une nouvelle civilisation ? Tout l’intérêt de l’ouvrage de Jacques Caplat est résumé dans cette phrase de conclusion. « Changeons d’agriculture – Réussir la transition ». Parce que les sources d’énergie fossiles s’épuisent, que nos activités polluent toujours plus l’environnement, tandis que le chômage croît et que le changement climatique menace notre survie, il nous faut changer de paradigme. Ce changement, qui ne sera certes pas brutal, mais progressif, doit commencer maintenant : c’est ce qu’on appelle la transition, ici agricole.
Après « L’agriculture biologique pour nourrir l’humanité » (Actes Sud, 2012) et suite à l’intérêt et aux questions qu’il a suscités, Jacques Caplat insiste ici davantage sur les questions pratiques posées par une évolution de l’agriculture française.
Comment en est-on arrivé à généraliser l’agriculture conventionnelle en Europe et aux Etats-Unis ? Pourquoi est-elle, aujourd’hui, un non-sens économique, social et environnemental ? L’auteur explore, avec précision, l’histoire de l’agriculture conventionnelle et les raisons pour lesquelles il va falloir évoluer vers autre chose : l’agriculture biologique, au sens de ses fondateurs d’il y a près d’un siècle. C’est-à-dire non pas une simple agriculture conventionnelle sans pesticides, comme le permet malheureusement le règlement bio européen actuel, mais un changement total de pratiques agronomiques et sociales. Jacques Caplat détaille les étapes de cette transition, sans jamais juger les agriculteurs conventionnels.
Quant au rôle du consommateur ? Suffit-il qu’il y ait plus de demande de consommateurs en bio pour que tous les paysans se convertissent en bio ? Non évidemment, l’auteur est clair là-dessus. « La simple consommation ne suffit pas à orienter le changement ! […] L’existence d’une « demande » est une condition nécessaire, mais non suffisante. Si les agriculteurs ne sont pas informés sur les réalités techniques et économiques de l’agriculture biologique, si elles ne leur est pas présentée comme une démarche d’avenir (en particulier si les institutions leur prétendent, à tort, qu’elle ne peut pas nourrir le monde), s’ils ne sont pas accompagnés et incités, ils n’évolueront pas, ou trop lentement. Les citoyens doivent donc aller au-delà de l’acte de consommation, ils doivent soutenir tous les micro-changements qui facilitent la transition chez les agriculteurs ». D’où l’importance, l’auteur le souligne, des AMAP et Jardins de Cocagne, comme geste politique et non uniquement consumériste.
Destiné au grand public aussi bien qu’aux agriculteurs, ce livre démontre qu’une autre agriculture est possible, étudie les conditions d’une transition pragmatique et ouvre des pistes pour l’action. Avec clarté et précision, il donne les clefs pour réconcilier agriculture, environnement et société. A lire !
Plus d’informations sur le blog de Jacques Caplat, notamment une petite vidéo qui donne un avant-goût du livre, les dernières interviews de l’auteur ainsi que le calendrier de ses interventions et conférences à venir :www.changeonsdagriculture.fr
Jacques Caplat est agronome et ethnologue. Fils de paysan, il a été conseiller agricole en chanmbre d’agriculture puis animateur à la fédération nationale d’agriculture biologique. Il a notamment participé à la création du réseau Semences Paysannes et s’est impliqué dans des actions de développement dans les pays du Sud. Il est l’auteur de nombreux rapports et conférences sur l’agriculture biologique, ainsi que du livre L’agriculture biologique pour nourrir l’humanité –démonstration, chez Actes Sud (2012).
« Changeons d’agriculture – Réussir la transition » de Jacques Caplat
Actes Sud, Domaine du possible
150 p
17 euros