L’« agrosocioécologie » : pour ne plus mourir de faim sur cette planète !

 

Partout dans le monde, de gros efforts d’équité et de solidarité restent à accomplir quand on sait que 20 % de l’humanité consomment 80 % des biens et denrées produits sur la Terre. Face à ce constat désolant, l’agrosocioécologie, concept apparu dans les années 1920, peut apporter des réponses et des solutions. Explications de Bernard Astruc, acteur dans la mouvance agroécologique depuis quarante ans.
L’incompréhension et le non-respect des lois de la nature ainsi que les graves inconséquences qui en découlent pour les hommes et la planète sont consternants voire catastrophiques ! L’agrosocioécologie est la seule voie pour instaurer une agriculture durable, respectueuse de l’environnement et de l’homme. Elle a vu le jour sous cette appellation en 1928, dans une revue qui en faisait état.
 
Elle permettra simultanément :
– d’alimenter sainement plus d’un milliard de personnes affamées sur Terre ;
– de faire face au réchauffement climatique qui progresse inexorablement ;
– de lutter contre l’épuisement des ressources naturelles déjà bien entamées ;
– d’entraver les phénomènes de désertification en procédant à la réhumidification des terres et à la nécessaire reforestation.
 
Elle met en pratique, de façon appropriée, différentes techniques, méthodes et traditions : l’agroforesterie, l’agrosylviculture, les cultures intercalaires, la permaculture (approche de conception des habitats humains et des systèmes agricoles qui imitent les relations présentes dans l’écologie naturelle), la culture sur BRF (bois raméal fragmenté), l’agrosylvopastoralisme traditionnel qui permet d’éviter les intrants et les déchets. 
Deux associations, parmi d’autres dans le monde, oeuvrent tout particulièrement pour la reconnaissance et le développement de l’agroécologie :
– Agrisud international – www.agrisud.org, éditrice du guide L’Agroécologie en pratique ;
– Terre et Humanisme – www.terre-humanisme.org, organisatrice de stages.
 
Non-sens… 
Non-sens, car personne n’est épargné : les exploités comme les exploitants. Et les exploiteurs des méthodes agroproductivistes de la monoculture intensive, aux effets dévastateurs maintenant bien avérés, qui se servent de la Terre comme d’un banal support à leurs techniques d’apprentis sorciers, en sont les victimes !
Les pesticides, qui épuisent les ressources de la planète, polluent aveuglément le sol, l’eau, l’air et la biodiversité, c’est-à-dire les règnes végétal, animal et, bien sûr, humain, avec un rendement de plus en plus faible. L’agriculture industrielle intensive est responsable à elle seule de 33 % des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine ! En soixante ans, l’efficacité énergétique de l’agroindustrie a été divisée par 20 :
– en 1940, 1 calorie d’énergie fossile >> 2,3 calories alimentaires ;
– en 2000, 10 calories d’énergie fossile >> 1 calorie alimentaire.
 
… ou contre-sens ? 
Contre-sens, car la vie ne peut bien s’exprimer naturellement (a contrario des techniques
désertifiantes de l’agrochimie) que dans la diversité et le mouvement, ordonnés par des processus de transformation et d’élaboration de la matière vivante aussi mystérieux qu’incontournables. Pour ce qui est de la fertilité, il s’agit du phénomène prodigieux de l’humus, capable de produire spontanément la plus abondante masse végétale sur Terre, qui est celle du milieu forestier et qui devrait être à la base de nos méthodes de fertilisation des sols dans le monde entier. Ainsi, chacun – où qu’il soit et quel qu’il soit – pourrait accéder à une nourriture équilibrée, non carencée, apte à bien le nourrir durablement, en quantité comme en qualité, dans le respect de son environnement naturel et de son bien le plus précieux, après la vie qui lui a été donnée : sa santé !
Bien que deux tiers de l’humanité soient en difficulté alimentaire par « manque » (dont 1 milliard d’êtres humains réellement affamés, ce que nous pouvons difficilement concevoir…) et un tiers par « excès », il faut rester optimiste et continuer à se mobiliser. En effet, il n’est pas encore trop tard à l’heure où, en France, on vient d’atteindre le nombre de vingt mille fermes en bio, où les installations/conversions au bio se font au rythme de quinze par jour, et où des organismes officiels européens comme internationaux sont en train de prendre conscience de la gravité de la situation mondiale et de ses solutions agrobioécologiques.
 
Un ouvrage à consulter
Un livre considérable, écrit par une vingtaine de paysans, universitaires, décideurs politiques, édité par l’association Minga avec les éditions du Linteau, vient justement de sortir, le 15 mars, sous le titre percutant « Seule la diversité cultivée peut nourrir le monde » en réponse aux affirmations contraires du délégué général de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce).
 
Bernard Astruc
Président de Bio Consom’acteurs Provence

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