Pour sauver la biodiversité, interdisons les pesticides !

La dangerosité des pesticides, omniprésents dans l’environnement et dans nos quotidiens n’est plus à prouver (voir bas de page) et la biodiversité est menacée par de nombreux dangers. Après une ré-autorisation à contre-courant des néonicotinoïdes « tueurs d’abeilles », les nombreuses promesses non tenues et les nouvelles déclarations, il est temps de passer aux actes !

Le 27 novembre 2017, Emmanuel Macron s’engageait à interdire le glyphosate d’ici trois ans. En 2019, après avoir repoussé et édulcoré à de nombreuses reprises sa promesse de campagne, l’interdiction du glyphosate était enterrée pour de bon.

L’utilisation des pesticides ne cesse d’augmenter

Après une baisse des achats et des utilisations en 2019, l’année 2020 connaît une nouvelle augmentation et la tendance se poursuit sur 2021. Depuis le Grenelle de l’environnement en 2007, qui avait fixé un objectif de réduction de 50 % de l’usage des pesticides de synthèse en dix ans, les plans de réduction successifs ont échoué. Pourtant interdits, le gouvernement acte en aout 2020 la ré-introduction « temporaire » des deux néonicotinoïdes « tueurs d’abeilles » au motif de sauver la filière de la betterave, sans remise en question des modes de production, ni incitation à un modèle plus résilient.

Des ventes constantes, une législation au point mort et une consommation en hausse

Pas de tendance à la baisse, ni de réglementation plus contraignante. La biodiversité peut manifestement attendre. Pire, en incitant et en finançant des démarches comme HVE, sans impact réel sur la biodiversité ou le climat*, (voir notre comparatif HVE vs bio), les signaux ne vont pas dans le sens d’une orientation vers des modèles agro-écologiques, seuls garants d’une biodiversité préservée. 

« Les politiques agricoles qui visaient unilatéralement à augmenter les rendements en utilisant davantage de produits agrochimiques toxiques ont amené l’écosystème au bord de l’effondrement. Jour après jour, la diversité biologique qui sous-tend nos systèmes alimentaires est en train de disparaître, menaçant gravement l’avenir de notre alimentation, de nos moyens de subsistance, de notre santé et de notre environnement. Les conséquences pour la nature sont désastreuses : les abeilles, les papillons et d’autres insectes disparaissent de nos paysages et des oiseaux autrefois très répandus ont cessé de chanter dans nos champs. Nos cours d’eau et nos rivières sont pollués et nous sommes exposés chaque jour à un cocktail de pesticides de synthèse via notre alimentation. » Voici ce que nous pouvions lire dans l’Initiative citoyenne européenne (ICE) « Sauvons les abeilles et les agriculteurs », lancée par Générations futures et 120 organisations, dont le but est d’en finir avec les pesticides de synthèse dans l’UE d’ici 15 ans.

Comme pour toutes les ICE, l’objectif était d’atteindre 1 million de signataires dans toute l’Union européenne avant le 30 septembre 2021. En seulement un mois, la pétition a connu un grand succès sans l’aide des grands médias. L’ICE a regroupé à la date où nous écrivons, 1 051 621 participants au 29/09/2021.  Ce succès corrobore l’urgence à agir pour une sortie des pesticides et l’importance que nous y donnons.

De nouvelles promesses d’Emmanuel Macron sur le Glyphosate sans cohérence avec le Plan stratégique national !

Vendredi 10 septembre 2021, à l’occasion du Congrès mondial de la nature de l’UICN, Emmanuel Macron s’est engagé à porter une initiative de sortie accélérée des pesticides dans le cadre de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022. Alors que la réalisation de cet engagement est entièrement dépendante de l’orientation choisie pour la future PAC, les choix politiques opérés par le ministre de l’agriculture Julien Denormandie pour la déclinaison française de la PAC y sont, à ce jour, totalement opposés. Pour que cette promesse ne vienne pas s’ajouter à la longue liste d’engagements sur les pesticides pris, en vain, par tous les gouvernements depuis 2008, 28 organisations dont Bio Consom’acteurs, demandent aujourd’hui une action concrète : la réorientation du Plan Stratégique National de la PAC avant soumission à la Commission européenne à la fin de l’année. Retrouvez l’intégralité du courrier en pdf ici  

Alors que la campagne présidentielle est lancée et que les promesses commencent à pleuvoir, nous ne pouvons pas nous offrir le luxe d’attendre encore pour agir concrètement. L’usage immodéré des pesticides et les pratiques agricoles sont directement liés à l’effondrement de la biodiversité.

L’IPBES, le « Giec de la biodiversité » publiait cinq rapports lors de sa 6e session plénière qui s’est achevée le 24 mars 2019 à Medellín, en Colombie : « La dégradation des terres, l’érosion de la biodiversité et le changement climatique sont les trois aspects d’un même problème majeur : l’impact dangereusement croissant de nos modes de vie sur la santé de la nature et des écosystèmes. Nous ne pouvons plus nous permettre de lutter isolément contre ces trois menaces ».

Pendant trois ans, près de 550 scientifiques d’une centaine d’États ont mené un travail de longue haleine à partir de plusieurs milliers d’articles scientifiques, de sources gouvernementales ou encore de savoirs locaux et indigènes. Leur constat est sans appel : la biodiversité est menacée sur tous les continents et dans tous les pays.  D’ici à 2050, 38 % à 46 % des espèces animales et végétales pourraient disparaître de la planète.  En première ligne, le Centre et le Sud des Amériques, l’Afrique subsaharienne et l’Asie, plus vulnérables face à l’appauvrissement des sols. Dans 30 ans, les populations vivant dans des régions arides pourraient passer de 2,7 à 4 milliards de personnes, renforçant le risque de crises migratoires. La dégradation des terres et le changement climatique, provoquant la baisse des rendements agricoles et l’instabilité socio-économique, pourraient en effet pousser entre 50 et 700 millions de personnes à migrer d’ici le milieu du siècle.

 « Au niveau mondial, on estime que près d’un tiers des terres – les sols, mais également les forêts, les prairies ou les zones humides – sont moyennement à fortement dégradées, certaines étant devenues inutilisables pour l’agriculture », souligne Hélène Soubelet de l’ipbs. Or, les sols hébergent 25 % de la biodiversité au niveau mondial. Une biodiversité cachée, microscopique, méconnue et surtout menacée. Selon leurs estimations, ce sont près de la moitié des zones humides qui ont disparu depuis le début du XXe siècle. Aujourd’hui, moins d’un quart des terres ont échappé aux effets substantiels des activités humaines ; il n’en resterait plus que 10 % en 2050, pour partie inexploitable. « Il s’agit désormais d’intégrer la biodiversité dans toutes les prises de décision, dans tous les secteurs de l’économie, et dans toutes les politiques publiques », affirme Jean-François Silvain de l’IPBS

Lors du dernier Congrès mondial de la nature de l’UICN, présenté comme « le plus grand événement mondial jamais organisé sur la biodiversité » a pu faire ressortir plusieurs chiffres marquants :

  • Les effectifs de plus de 20 000 populations de mammifères, d’oiseaux, d’amphibiens, de reptiles et de poissons » ont chuté de 68% selon le dernier rapport « Planète vivante » du Fonds Mondial pour la Nature (WWF)
  • La population d’oiseaux a diminué de près de 30% en France en trente ans
  • 31 espèces menacées se sont éteintes en décembre 2020. Cette liste est établie par l’Union internationale pour la conservation de la nature. Elle catégorise presque 129 000 espèces animales et végétales. Parmi elles, pas moins de 35 765 sont menacées d’extinction et donc, 31 sont entrées l’année dernière dans la catégorie « éteinte », c’est-à-dire qu’elles ont disparu à l’état sauvage.

 

Après la pollution de l’air et le climat, l’Etat fait désormais face à un recours pour carence fautive sur la biodiversité, visant le processus d’autorisation des pesticides à l’origine d’une chute du nombre de pollinisateurs et d’oiseaux migrateurs. Lancé jeudi 9 septembre par Notre Affaire à Tous et Pollinis, il enjoint le gouvernement à agir « de manière satisfaisante » dans les deux mois.

La France reste l’un des pays consommant le plus de pesticides (en valeur absolue) en Europe, alors même que ces substances sont considérées comme étant l’une des causes de la destruction de la biodiversité. Ainsi, « force est de constater que l’État français ne tient pas les objectifs de protection de la biodiversité qu’il s’est lui-même fixés », écrivent ainsi les équipes de Justice pour le vivant, dont la démarche est une première mondiale.

Les pesticides nocifs pour le vivant sont autorisés sans contrôle rigoureux et sans évaluation pertinente de leurs effets réels sur la biodiversité. Aujourd’hui, c’est l’ensemble des territoires qui sont contaminés durablement par une pollution diffuse, les molécules se retrouvant à long terme dans les sols, l’air, les cours d’eau et les nappes phréatiques.

 Pour notre santé, celle de la planète et de la biodiversité qui nous entoure encore, il est grand temps de passer aux actes !!

 

Pour aller plus loin :

Comparatif HVE et bio

Climat et récolte

Dérives du dernier sommet sur les systèmes alimentaires

Retrouver la pétition « Sauvons les abeilles et les agriculteurs»

Une europe 100% bio est possible

Sources :

Disparition de la biodiversité :

CNRS – oiseaux des champs

Fondation biodiversité – IPBS

Reporterre – effondrement de la biodiversité

Notre affaire à tous  et Pollinis recours contre l’état

Liste rouge UICN

Lien pesticides-biodiversité

Chiffres générations futures

Pollinis

CNRS

Auvergne -la biodiversité en régression

Rapport dévaluation des pollinisateurs – gouv.fr

Green peace -abeilles

Bio Consom’acteurs – loi diversité

Chiffres consommation et achat pesticides en France :

Générations futures carte des pesticides

Générations futures –analyse des données provisoires

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