Portrait du mois de Carole Piette

 Qu’est-ce que la consommation responsable selon toi ?

Tout simplement, une consommation réaliste. Nous voyons bien que le modèle du « pas cher et en grande quantité, tout le temps disponible partout dans le monde, jetable, immédiat et sans contrainte » ne fonctionne pas.

Rapidement, un aliment. Pour qu’il ne soit pas cher, il faut limiter le temps et la main d’œuvre pour le cultiver. On prend donc une grande parcelle dépourvue d’arbres, qu’on pulvérise d’herbicides pour ne pas avoir à désherber. Mais alors, la culture est exposée aux ravageurs. Pour lutter contre ces chenilles, insectes ou autres (les ravageurs ne sont pas les mêmes partout), on a recours à des pesticides qui les élimineront tous. Il faut aussi éliminer les attaques au sol, donc fongicides. Nos plants se retrouvent seuls, exposés aux aléas climatiques car ils n’ont plus d’arbres pour faire barrière, et dans des sols appauvris car les produits ont aussi éliminés des champignons et auxiliaires de cultures bien utiles. Heureusement, il y a les phytosanitaires pour soigner nos plants…Jusqu’au jour où de nouvelles attaques imposent de nouveaux phyto, pesticides, etc. C’est ainsi que nous avons appauvri les sols de quasiment toute la planète et la qualité nutritionnelle des aliments. C’est ainsi que, sans apports chimiques, il faut du temps pour recommencer à produire en quantité, car les sols sont comme des drogués en sevrage : pas bon à grand-chose.

Je vulgarise, et je ne vais pas jusqu’à la fin : transformation, conditionnement, transport, pertes, déchets… Et ce n’est que l’exemple de la culture alimentaire. Mais à chaque fois que nous consommons, même de l’immatériel comme des produits numériques, nous avons un impact.

La consommation responsable, c’est à la fois être réaliste et chercher à avoir un impact positif sur l’environnement, l’humain et les autres espèces. La nature n’est pas un puit sans fond et obéit à des cycles qu’il est préférable de préserver pour notre propre bien être.

– Comment devient-on une consom’actrice ? Raconte-nous ton histoire…

J’ai voyagé très tôt avec mes parents, aux quatre coins du monde et hors des circuits organisés. Et j’ai passé les week end de mon enfance dans un potager. A partir de là, je dirai que le lien entre nos actions, notre consommation et le monde dans lequel nous vivons se fait naturellement. Et puis, j’ai commencé ma carrière professionnelle en faisant du Commerce Equitable, en rencontrant les producteurs des coopératives de ces produits qui arrivent sur nos étals. Alors, je crois que j’ai toujours vu les « produits » comme des histoires qui commencent dans la nature, façonnés par des mains humaines et qu’on ne peut pas se contenter d’absorber, accumuler et jeter sans affect.

– Concrètement, qu’est-ce que ça a changé pour toi ?

Mon parcours a commencé tôt, de façon intuitive. Puis, j’ai intellectualisé cette idée de consom’action, ce fait que nous pouvons impacter le monde par notre façon de consommer. Nous avons tellement dégradé la planète ces 100 dernières années, que si nous nous attelions tous à la réparer, il y aurait du travail pour chacun. Mais, comme nous ne prenons pas encore cette voie, il me semble que la consom’action est le moyen le plus rapide de faire évoluer nos systèmes. A condition que nous soyons assez nombreux à agir. Donc, je dirai, que la consom’action me donne de l’élan. Tout est possible et chacun peut agir.

– Peux-tu nous en dire plus sur la marque Conscients que tu as co-fondée ?

C’est une marque dédiée aux familles, des produits bio et équitables pour enfants, des arbres à offrir à ses proches. C’est ma façon de sensibiliser à la consom’action, car beaucoup de personnes se tournent vers des modes de consommation plus durables à la naissance de leur premier enfant. J’essaye de leur montrer les solutions que je connais.

C’est aussi une organisation qui accompagne les entreprises qui souhaitent communiquer et s’engager sur des projets environnementaux.

– Comment es-tu arrivée au Conseil d’administration de Bioconsom’acteurs ?

Un échange avec sa présidente lors d’un forum de PME Bio. C’est une association indispensable, car les consom’acteurs peuvent réellement peser auprès des entreprises et des pouvoirs publics. Ils peuvent demander plus de bio bien sûr mais pas uniquement, ils peuvent exprimer leurs attentes par rapport à la bio et à la consommation responsable : bio, local, de saison par exemple.

– Quels conseils donnerais-tu à un novice qui veut se lancer dans la consommation responsable ?

Ne pas se stresser, parce que c’est ce que j’observe souvent. Les personnes qui veulent s’engager, se sentent vite dépassées, impuissantes. Il y a parfois aussi de la culpabilité parce qu’on voudrait mieux faire. Mais, je crois que c’est un chemin qui progresse pas à pas, et qui doit s’accompagner d’un épanouissement personnel. Parce qu’en voyant qu’une personne s’épanouit en consommant mieux, ses proches seront tentés de suivre le chemin. Et nous avons besoin d’être nombreux à consom’agir !

 
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