La fin des néonicotinoïdes : la France renonce enfin !

 

 

75 % des insectes ont disparu depuis les années 90 (source : S. Foucard, Et le monde devint silencieux). Depuis les années 2000, on note une perte drastique dans les colonies d’abeilles (-30% par an : source : étude ANSES 2017-2018) et les populations d’oiseaux (49 % en déclin : source : Reporterre). L’usage de nouvelles générations d’insecticides systémiques, appelés néonicotinoïdes, coïncide avec ce déclin et représente un drame environnemental.

 

Que sont les pesticides néonicotinoïdes? 

On vous en parlait déjà dans cet article.

Les pesticides néonicotinoïdes sont des insecticides super puissants, mis sur le marché dans les années 90. Ces insecticides dits systémiques percolent directement dans la sève, le pollen et le nectar de la plante ; ils sont donc très efficaces, même à petites doses auprès des insectes. Ils détruisent le système nerveux central de ces derniers, ce qui entraîne leur paralysie et leur mort. 

Ils ont une écotoxicité bien plus importante que les substances précédentes : en 2010 par exemple, l’utilisation de 20 000 tonnes d’imidaclopride (un pesticide de la famille des néonicotinoïdes), a entraîné en une année, la disparition équivalente à un train d’abeilles long de 3 années lumières (si l’on mettait les abeilles mortes les unes derrière les autres).

Ces pesticides s’accumulent dans les sols, polluent les eaux souterraines, les plantes sauvages, et de fil en aiguille, contaminent toute la chaîne alimentaire et l’environnement.

La puissance destructrice des néonicotinoïdes est gigantesque. On entend souvent dans les médias que ces produits sont utilisés en plus faible quantité par rapport aux anciens produits phytosanitaires (notamment avec la technique d’enrobage de semences). Or, ils sont tellement plus puissants qu’ils sont, in fine, bien plus destructeurs que les précédents.

L’emprise et l’influence des firmes agrochimiques sur la recherche scientifique, les instances de régulation et le débat public pour cacher la toxicité de leur produit conduit à un massacre écologique.

500 000 morts prématurés chaque année seraient imputées au déclin des abeilles. En effet, une baisse de la pollinisation engendre une baisse de la production agricole et conduit donc à une baisse de nourriture. Ce phénomène affecte en particulier les pays du tiers monde, par exemple au Népal, on note une baisse de 31 % de la production dû au déclin des abeilles (source : Reporterre).

Pourtant, selon F. Codate, 95% des traitements systémiques sont inutiles (source : S. Foucard, Et le monde devint silencieux).

 

Le cas français : une interdiction lente et quasi inexistante des pesticides

L’imposition d’un moratoire sur les pesticides est difficile voire impossible. La France est très lente dans sa juridiction, alors que les premières études prouvant l’extrême toxicité de ces produits, menées par Bayer lui même, datent de 1989 et 1993.

En 1997, le ministère de l’agriculture lance une étude afin de comprendre ce phénomène nouveau. J-M Bonmatin est chargé d’étudier les effets des néonicotinoïdes sur le miel des abeilles. Or Bayer est associé à l’étude et limite les analyses… En 1998, il présente des résultats alarmants à la Commission des toxiques, mettant en cause des pesticides. Le chercheur est alors remercié par la suite… et les résultats sont peu écoutés. L’imidaclopride est finalement interdit en 1999. Mais il n’y a aucune amélioration nette : les substances interdites sont rapidement remplacées par de nouvelles molécules aussi toxiques, engendrant des effets épouvantables sur les invertébrés et les insectes.

La loi biodiversité de 2016 interdit en France l’utilisation des insecticides néonicotinoïdes. Néanmoins, les producteurs de betteraves sucrières obtiennent depuis des autorisations temporaires particulières par le gouvernement, afin de lutter contre la jaunisse des cultures. En décembre 2022, le Ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, annonce être en faveur d’une nouvelle dérogation.

 

L’Europe s’impose : la décision de la France est jugée illégale

En janvier 2023, la Cour de Justice de l’Union Européenne juge la décision du gouvernement français illégale, car ces pesticides sont interdits sur le territoire européen. Le ministre de l’agriculture Marc Fesneau est contraint de revenir sur la dérogation. C’est une victoire pour la biodiversité, ainsi que pour les associations de défense de l’environnement qui luttent depuis des années.

En espérant que cette décision ne soit pas à nouveau remise en question…

© Red / Reporterre

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