La fin des élevages de poules de plein air ?

Deux arrêtés du ministère de l’Agriculture, publiés fin septembre, généralisent l’enferment des volailles une grande partie de l’année. En privilégiant l’enfermement des animaux en bâtiments en cas d’alerte sanitaire, « ils créent un droit de produire pour les industriels et une impossibilité à produire pour les éleveurs et éleveuses de plein air »

C’est l’autre épidémie du moment : l’influenza aviaire, hautement pathogène, couramment connue sous le nom de grippe aviaire. Le virus circule activement en France. Si elle est sans danger pour l’humain, elle reste redoutable pour les oiseaux. Les gouvernements européens semblent paniquer face à cette reprise.

Les éleveurs de plein air ont donné l’alerte suite à la publication des deux derniers arrêtés du ministère de l’Agriculture, en publiant un communiqué, une pétition et en manifestant dans plusieurs villes. A Paris, le 14 octobre dernier, était organisée une vente symbolique des « 10 000 derniers œufs de plein air » à l’initiative de la Confédération paysanne et du MODEF.

Cela faisait des mois qu’ils redoutaient la nouvelle réglementation après le dernier épisode de grippe aviaire qui a semé le chaos dans les élevages du sud ouest de l’automne au printemps dernier. 3,5 millions de volailles ont été abattues. Ces nouvelles règles sont sorties le 30 septembre sous la forme de deux arrêtés du ministère de l’Agriculture. L’un établit une cartographie des départements les plus vulnérables au virus H1N1, propagé par les oiseaux sauvages ; l’autre fixe les mesures de biosécurité et de prévention dans les zones à risques de diffusion, dites ZRD. L’ensemble, alertent la Confédération paysanne et le Modef, menace l’avenir des petits élevages en extérieur, ainsi que la vente de volailles en circuits courts.

En privilégiant l’enfermement des animaux en bâtiments en cas d’alerte sanitaire, « ils créent un droit de produire pour les industriels et une impossibilité à produire pour les éleveurs et éleveuses de plein air », déplorent les deux syndicats dans le communiqué commun. « À l’inverse, rien n’est prévu pour baisser en densité, pour limiter les mouvements d’animaux vivants, de flux, d’intervenants, pourtant facteurs majeurs de propagation de l’influenza aviaire », soulignent encore les organisations.

Un bien être animal mis à mal

La réglementation met encore plus à mal le bien-être des volailles. Celles-ci passent ainsi de six mètres carrés en plein air (ou 9 mètres carrés en Bio) à 20 fois moins d’espace et en lieu clos. Une situation bien loin de remplir les conditions du respect du bien-être animal revendiqué par les labels « élevé en plein air » et aux antipodes des principes de production en agriculture biologique.

Une tromperie pour le consommateur

Nous achetons donc des poules ou des œufs bio ou « de plein air » qui ne le seront pas… Il y a un décalage entre la volonté d’achat, l’étiquette et le mode de production. Une situation aussi intenable pour les éleveurs que pour les consommateurs, qui réclament pourtant de plus en plus le respect du bien-être animal.

Une aberration sanitaire

Cette réglementation peut aussi s’avérer contre-productive. Les poules pourraient justement tomber plus malades, en restant dans un lieu clos, comme ce fut le cas pour les dernières contaminations. Plus fragiles et de plus forte densité, les élevages sont d’autant plus sujets à la propagation d’un virus.

Une incitation au tout industriel

Au final, les premiers bénéficiaires de ces mesures seront les industriels de la poule en batterie qui ne voient aucune de leurs pratiques remises en question. L’équivalent de la surface d’une feuille A4 restera la norme pour la vie d’une poule de batterie, les déplacements massifs d’animaux, cause de la rapidité de la transmission, resteront autorisés… Aucun impact économique négatif ne touchera donc la filière industrielle.

Une nouvelle mise à mort des petites exploitations

Les nouveaux arrêtés mettent fin à une dérogation qui permettaient aux petits élevages d’éviter de confiner leurs animaux, même si pour les volailles de chair par exemple, en présence de bâtiments de moins de 120 m2 ou en circuit court autarcique, elles pourront bénéficier de parcours réduits de 500 m2 maximum pour 1000 volailles, à partir de la 10ème semaine d’âge.

La Confédération paysanne table sur une disparition de 30 % des éleveurs et éleveuses de volailles de plein air du fait de cette « réglementation assassine » !

En résumé les nouveaux arrêtés vont porter atteinte aux petits élevages, sans atténuer les risques d’épidémie, tout en trompant les consommateurs, on n’arrête pas le progrès…

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