Pierre Rabhi,« L’ensemenseur » de conscience
Pierre Rabhi, pionnier de l’agro-écologie, éveille les esprits de la jeune génération
Le 15 avril,
J’arrive à table, je rejoins les copains pour prendre un verre, je suis comme une pile électrique, je crie en sautant de joie à qui veut l’entendre, « Y a pierre Rabhi à Lyon le 7 mai !!! »
Le cinéma, le Comoedia, organise une projection du film « Au nom de la terre » et invite Marie-Monique Dhelsing, la réalisatrice, ainsi que Pierre Rabhi, pour un débat après la projection.
Regards interloqués, point d’interrogation au milieu du front.
– « Mais Pierre Rabhi ? c’est qui ? »
Pas évident d’expliquer à ses amis qui est Pierre Rabhi quand on a 24 ans.
Donc je leur donne la première métaphore qui me passe par l’esprit : « C’est le Mick Jagger de l’écologie ».
Ça percute un peu, on en discute.
Peut-être que le soir, tout le monde a fait tourner son moteur de recherche sur Pierre Rabhi. S’ils ont retenu ça : Pierre Rabhi est un des pionniers de l’agriculture biologique. Il défend un mode de société plus respectueux des hommes et de la terre et soutient le développement de pratiques agricoles accessibles à tous et notamment aux plus démunis, tout en préservant les patrimoines nourriciers.(source pierrerabhi.org)…ce sera déjà pas mal !
Le 7 mai
J’ai fini par trouver des amis qui avaient autant envie que moi de voir Pierre Rabhi pour la première fois.
On est partis à cinq et puis on a embarqué des adhérents de Bio Consom’acteurs du Rhône. Et puis sur place on en a vu d’autres : ça faisait plaisir.
Je stressais parce qu’on était partis en retard de la maison.. Arriver en retard à une soirée marquante c’est toujours moche.
Alors on a couru.
Arrivés avenue Berthelot, devant le cinéma , on s’est rendu compte que c’était la cohue. Une file sur le trottoir, tout le monde attendait.
On a papoté avec le comité de soutien lyonnais de Notre Dame des landes j’ai essayé de me calmer.
La soirée a commencé. Salle bondée, projection opé !
Dans le noir j’ai pris des notes. Je voulais tout noter mais j’ai juste des phrases, des morceaux de discussions. Les points ci-dessous représentent bien l’ensemble.
Selon Pierre Rabhi, qui se considère comme « l’avocat et le thérapeute de la Terre » :
– Monsanto prône les OGM « comme la main tendue de Dieu », avec pour conséquence, de la dépendance des agriculteurs vis-à-vis du semencier. Il accuse les multinationales d’avoir organisé un « hold-up des sur les biens communs » ;
– « les paysans sont des artisans », souligne Pierre Rabhi, certain que l’agroécologie est « la seule alternative à la crise mondiale ». Non seulement l’agriculture et l’élevage redonnent de l’autonomie aux agriculteurs, mais ils permettent aux milieux de se régénérer :;
– « On a toutes les raisons de s’inquiéter et de s’indigner » affirme Pierre Rabhi, pour lequel « la résistance est légitime » ;
– Ses conseils : « Chacun chez soi mais tous proches les uns des autres », « soyons enclins à vivre dans des espaces communs » ; « nourris-toi toi-même » ; « faire les choses par cohérence, sa propre cohérence, rendre hommage à la vie qui nous est donnée » ;
– A la question « l’humanité est-elle intelligente ou non », il répond non. Et que « si des extra terrestres nous regardent, ils doivent se dire «ils sont doués, mais tellement stupides ! » ;
– Il invite à ce que « la conscience collective s’élève à un point de cohérence vers la vie ». Sur l’existence d’une vie après la mort, il dit qu’il « n’en sai[t] rien », mais qu’il sait « qu’il y en a une avant [la mort, NDLR]et qu’il faut lui rendre hommage ».
– Il reconnaît qu’il est difficile d’être cohérent dans le monde d’aujourd’hui : « je suis venu en voiture, j’ai dû payer l’essence de ma voiture, j’ai donc donné mon argent à une multinationale ». Dénonçant cette « virtualisation » du monde et du système, il « essaie d’être cohérent sur les choses sur lesquelles [il a] une emprise dans [sa] vie ». Un des plus grands paradoxes pour lui est que « la créativité soit bloquée dans son carcan par la vie de tous les jours ».
– Enfin, Pierre Rabhi dit clairement faire partie des décroissants
« Au nom de la Terre »retrace la vie de Pierre Rabhi, son cheminement, ses actions , ses idéologies. Au fil du documentaire on rencontre les gens qui l’entourent, avec qui il crée, soutient, échange.
On découvre , entre autres :
– Phillipe Desbrosses, agriculteur, docteur en sciences de l’environnement, écrivain et pionnier de l’agriculture biologique en Europe,
– Tristan Lecomte, qui dirige Alter Eco , une PME française qui dirige l’importation et la distribution de produits issus du commerce équitable,
– Michel Valentin, co-fondateur du projet des Amanins dans la Drôme. Lui et Pierre Rabhi se posaient la curieuse question quelle planète laisserons-nous à nos enfants et quels enfants laisserons nous à la planète ?
– Hélène Hollard, professeur d’agro-ecologie.
Grâce au film, on visite le monastère de Solan dans le Gard, où Pierre Rabhi est à l’origine de l’option « écologie » du monastère. On y apprend que Solan est en train de devenir « un exemple de l’agro-ecologie pour les autres monastères, en particulier les monastères Ortodoxes roumains ».
Le spectateur passe ensuite par le Hameau des Buis, chez Sophie Rabhi-Bouquet. Cette association aurait joué « un rôle majeur dans l’éducation des enfants et dans l’éco-construction du hameau », d’après le documentaire.
Le film nous fait ensuite découvrir Cyril Dion, directeur du mouvement Colibris, cette association qui a pour vocation d’encourager l’émergence de nouveaux modèles de sociétés fondés sur l’autonomie, l’écologie et l’humanisme. Un mouvement destiné à « tous ceux qui veulent agir pour le changement ».
Enfin, Edgar Morin,sociologue et philosophe français, nous rappelle que le réalisme n’est pas quelque chose de figé.
Ne croyez pas que je vous ai tout raconté.
Quoi ? vous êtes encore là ?
Filez au cinéma !
Propos recueillis par Maude