Travail en bio vs travail en conventionnel

Parce qu’elle réclame plus de main d’œuvre que l’agriculture conventionnelle, l’agriculture biologique, locale et équitable offre de nombreuses perspectives d’emplois. Le sens en plus, à condition qu’elle reste fidèle à ses valeurs d’origine.

Travailler avec la vie et non contre elle : au-delà du cahier des charges et du label AB, la bio n’est pas qu’un mode de production répondant à un marché. C’est un système dans lequel l’humain, le vivant en général, est placé au centre.

Certes, il n’y a pas de volet social dans le cahier des charges en bio. Mais lorsqu’elle respecte ses valeurs originelles et n’est pas dévoyée par l’agroindustrie, la bio cultive l’emploi et la solidarité : conditions de travail dignes, prix justes et équitables, etc. Des critères pris en compte par un certain nombre de labels, dont vous pouvez repérer certains ici. Des valeurs qu’il est impossible de retrouver dans les cultures bio industrielles, comme celles d’Andalousie, qui surexploitent nappes phréatiques et immigrés sans papiers, dans un seul objectif : gagner de l’argent le plus vite possible.

 

Source d’emplois

Une exploitation bio emploie en moyenne presque 2 fois plus de gens qu’une exploitation conventionnelle : 2,4 unités de travail annuel (UTA, c’est à dire le temps de travail d’une personne à temps complet pendant un an), contre seulement 1,5 en conventionnel. Cet écart varie fortement selon les cultures. Ainsi la viticulture bio emploie 3,5 UTA, contre 1,8 UTA en conventionnel. En grandes cultures, c’est 1,7 UTA en bio contre 1,1 en conventionnel. En revanche, en maraîchage, on travaille autant en bio qu’en conventionnel (3,7 UTA) (Source : Agence bio).

Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation (FAO), 40 000 emplois nets seraient créés si l’Union européenne convertissait  10% de ses systèmes agricoles en bio.

En termes d’emploi, l’agriculture biologique a des répercussions bien au-delà du champ :

  • Les activités de transformation et de vente directe nécessitent de la main d’œuvre. Pour travailler dans les légumeries, ateliers de transformation indispensables à la restauration collective si on veut faire du bio et local, il faut des gens ; il en faut aussi pour préparer et distribuer les paniers en circuit court, qui se développent de façon exponentielle en ville (paniers AMAP, magasins de producteurs, etc.).
     
  • En matière de recherche, développement et formation en agriculture bio, il y a tout à faire. Outre les lycées agricoles, centres techniques et de documentation, cette recherche peut avoir lieu grâce aux fermes expérimentales, qui cultivent selon des techniques agroécologiques et partagent les résultats de leurs essais aux autres agriculteurs et aux scientifiques. C’est le cas, par exemple, du réseau des Fermes d’Avenir, de la ferme du Bec Hellouin, de la ferme des Bordes, voire des fermes Dephy (sous l’égide du Ministère de l’agriculture depuis 2009).
     
  • L’élaboration et la fabrication de certains outils surtout utilisés en bio nécessite aussi de nouveaux savoir-faire, donc des emplois : herses-étrilles, houes rotatives, désherbeurs thermiques, semoirs de précision, binettes de précision…et même d’anciens outils qui ont prouvé leur efficacité par le passé et sont remis au goût du jour, comme le fait la ferme du Bec Hellouin.
     
  • Enfin, pour construire des filières bio de manière durable, il faut construire et gérer de nouvelles infrastructures locales et rurales (réseaux d’électricité et d’eau, écoles…). Ce qui ouvre des perspectives d’emploi. 
     
  • Selon le convertisseur Terre de liens, si tout le monde en France mangeait bio et local, on créerait des emplois pour plus d’un million de paysans et paysannes installés en bio…

 

Plus une activité agricole est gourmande en pesticides et en engrais de synthèse lorsqu’elle est en conventionnel, plus elle réclame de travail humain lorsqu’elle passe en bio : du coup, vignes et fruits, très gourmands en intrants chimiques en conventionnel, demandent beaucoup plus de travail lorsqu’ils passent en bio.
 

Plus grande satisfaction au travail
 

  • En bio, on travaille souvent plus dur qu’en conventionnel, selon l’Inra. Non seulement en termes de volume de travail, qu’il soit quotidien, mensuel ou annuel. Mais aussi en termes de technicité, de complexité voire de pénibilité. Ceci dit, ce qui est bien moins pénible en revanche, c’est l’absence de contact permanent avec les pesticides chimiques en bio. Ces derniers sont responsables (entre autres facteurs) de la destruction de la biodiversité et sont fortement suspectés de causer des pathologies diverses et graves, en premier lieu chez les agriculteurs.
  • L’agroécologie est une science relativement récente, qui se base à la fois sur les savoirs ancestraux du monde paysan et sur des connaissances scientifiques récentes, surtout en écologie, mais aussi en hydrologie, science des sols, botanique, etc. Cela demande non seulement de se pencher sur les savoir-faire traditionnels mais aussi d’acquérir des connaissances modernes, notamment en écologie c’est à dire l’étude des interactions entre les êtres vivants et leur milieu…Apprendre de nouvelles choses, n’est-ce pas un ressort essentiel de la satisfaction au travail?
     
  • Fini l’épandage systématique d’engrais et de pesticides ! En bio, on est obligé de réfléchir, d’observer les animaux, le sol et les plantes, de tester et de faire face aux échecs pour mieux rebondir. A force de relever ces défis, le paysan bio développe une connaissance fine de son milieu, et par-là même un vrai savoir-faire et une vraie capacité d’adaptation aux changements. Et c’est celle-ci, qu’on nomme aussi résilience, qui nous permettra de nous adapter au changement climatique.
     

De la vie dans les campagnes

 

  • Pour de nombreuses raisons, le paysan bio est mieux valorisé que le conventionnel. D’abord par sa maîtrise de l’ensemble des cycles de production, sa plus grande autonomie notamment vis-à-vis de la grande distribution, un meilleur accomplissement dans son travail, le contact direct avec les consommateurs…Ensuite grâce à la reconnaissance symbolique et sociale (dans les valeurs portées par la bio), mais aussi matérielle : la rentabilité économique en bio est au moins égale qu’en conventionnel.

En somme, le travailleur en bio retrouverait l’intérêt du métier d’agriculteur.

  • L’agriculture bio dynamise la vie des campagnes, à la fois d’un point de vue social comme d’un point de vue économique :  non seulement grâce aux emplois directs, indirects et induits, mais aussi par les relations de proximité nouées entre producteurs et consommateurs, via les activités de vente directe ou en circuits courts. Enfin, l’agriculture bio attire plus de jeunes que le conventionnel, qui sont mieux formés et plus nombreux à s’installer sans cadre familial. Une fraîcheur bienvenue dans la population agricole, qui se renouvelle et se revivifie. 

Conclusion : Emplois plus intenses mais plus satisfaisants, découverte de nouveaux savoir-faire, attrait économique dans la mesure où la demande des consommateurs en produits bio ne faiblit pas : le secteur de l’agriculture biologique ne connaît(ra) pas la crise.

 

Sources :
Agence bio : La bio en France, 2016
Inra, note de synthèse « Vers des agricultures à hautes performances », 2013
Fao, « Green jobs for a revitalised food and agriculture sector), 2012
Programme des Nations unies pour l’environnement « Green jobs, towards decent work in a sustainable, low-carbon world », 2008
Fnab (charte)
 

A lire:

Visions d’un élevage bio – photos de Rose-Marie Loisy (article Bio Consom’acteurs)
Bio et autonome : le chamboulement d’une ferme conventionnelle (article Bio Consom’acteurs)
La méthode de la ferme du Bec-Hellouin (article Bio Consom’acteurs)
Une forêt qui se mange (article Bio Consom’acteurs)
Landmatters : la permaculture comme projet de vie (article Bio Consom’acteurs)
Affiche La ferme bio (outil pédagogique Bio Consom’acteurs, en téléchargement libre)

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