Questionnaire européen sur la bio: comment éviter les pièges

Depuis mi-janvier, la Commission européenne consulte  tous les citoyens de l’UE sur l’agriculture biologique, via son site internet. Bio Consom’acteurs vous donne quelques clefs pour éviter de tomber dans les pièges.

Mise à jour 25/09/2013: Les résultats de ce questionnaire montrent, selon La France agricole, que les citoyens européens ont confiance dans les produits bio mais qu’ils aimeraient que les règles soient plus strictes. A bon entendeur…

Jusqu’au 10 avril, vous pouvez donner votre avis sur la bio aux dirigeants européens via un questionnaire en ligne. L’enjeu ? Un futur «réexamen de la politique européenne relative à l’agriculture biologique», précise la Commission. Celle-ci assure qu’elle prendra nos réponses au sérieux.  «Ces informations complémentaires, obtenues de façon informelle au plus près du citoyen, entrent en compte dans l’élaboration de nouvelles politiques et permettent d’améliorer les mesures existantes», nous dit-elle. Vingt minutes suffisent pour y répondre, alors soit. Un petit éclairage préalable, tout de même.

Au programme du réexamen de la politique communautaire : simplification du cadre juridique sur la bio sans affaiblissement des normes ; coexistence des OGM et de l’agriculture biologique ; amélioration des systèmes de contrôle et des régimes d’échanges des produits bio ; et impact des nouvelles règles d’étiquetage. Pour rappel, l’agriculture biologique définie par l’Europe (son label est l’eurofeuille) doit respecter un cahier des charges soumis à un règlement européen, entré en vigueur le 1er janvier 2009. Son respect, par chacun des opérateurs de la filière bio (paysans, transformateurs, etc.), est vérifié une fois par an au minimum par des organismes certificateurs privés, tels que Ecocert, Qualité France ou encore Certipaq (en France). Il faut savoir que la coexistence OGM/agriculture bio est impossible au seuil de 0,1%, avait estimé le Haut conseil des biotechnologies français l’année dernière (voir l’article de Bio Consom’acteurs à ce sujet et le rapport de Greenpeace sur la contamination de cultures bio par des OGM en Espagne).

Première question fallacieuse, la Q 2.4. « Etes-vous disposé à payer plus pour les produits bio que pour les autres aliments ? »

-> Les consommateurs paient déjà plus cher les produits bio que les conventionnels. Ce qui est injuste : en réalité, l’agriculture conventionnelle coûte plus cher à la société que ce qu’indiquent les prix en magasin, à cause des dommages qu’elle entraîne sur l’environnement (pollution aux nitrates, aux pesticides, émissions de gaz à effet de serre, déforestation, érosion des sols, etc.) et sur notre santé (voir le rapport de la récente mission sénatoriale qui dénonce une sous-évaluation des risques des pesticides sur la santé). Or, nous ne payons pas ces coûts indirects en achetant nos fruits et légumes. Les prix des aliments conventionnels sont donc faussés, sous-estimés. Une solution pour stimuler l’agriculture et la consommation bio serait donc de rétablir le vrai prix des aliments, en intégrant les externalités. L’idéal serait donc de répondre oui à cette question… tout en envoyant un mail à la Commission européenne pour lui suggérer de faire en sorte que la future politique agricole européenne (Pac, qui entrera en vigueur en 2014) subventionne davantage les agriculteurs bio ou en conversion, ainsi que les formations à l’agriculture bio. Et qu’elle conditionne les aides aux agriculteurs conventionnels au respect des mesures agro-environnementales et des lois communautaires sur l’environnement (directive-cadre sur l’eau, etc.). Pour agir concrètement pour une nouvelle Pac, vous pouvez aussi contacter le député européen de votre circonscription, dans le cadre de la campagne Go M.A.D (go meet a deputee).

Q 4.7 et 4.8. On nous demande si les règles d’étiquetage des produits bio sur la présence «accidentelle ou inévitable» d’OGM doivent être les mêmes que pour les conventionnels. Et si le seuil au-delà duquel une éventuelle présence accidentelle d’OGM doit être indiquée sur l’étiquetage des produits bio devrait être inférieur, ou non, au seuil autorisé pour les produits traditionnels.

-> Traduction : voulons-nous que les produits labellisés bio soient plus fermes que les autres quant à la présence d’OGM  ? Il nous semble que oui. Pour rappel, aujourd’hui, les seuils d’indication de présence d’OGM sont les mêmes entre produits conventionnel et bio. Un produit peut donc contenir jusqu’à 0,9% d’OGM et être labellisé bio. Or, ce seuil était de 0,1% en France (label AB) avant l’harmonisation européenne de 2009. Les exigences en matière d’OGM dans les produits bio ont donc été affaiblies. Si l’on défend une nourriture sans OGM, nous devons exiger que le seuil d’OGM dans les produits bio soit plus bas que celui dans les produits conventionnels. Par ailleurs, comme rappelé plus haut, la coexistence OGM/bio au seuil de 0,1% étant hautement improbable, une telle évolution du seuil de présence pour étiquetage rendrait bien difficile le lancement de cultures OGM en territoire européen. Ce qui tomberait plutôt bien.

Q 4.9. «En tant que consommateurs, seriez-vous disposé à payer un prix plus élevé pour les produits bio, si cette augmentation résultait de la baisse du seuil au-delà duquel la présence éventuelle d’OGM doit être indiquée ?»

-> L’Europe nous précise que «la diminution de ce taux et/ou le renforcement des exigences en matière d’étiquetage» concernant la présence d’OGM serait «susceptible d’entraîner une augmentation des prix pour les consommateurs». Oh ? Et si ce n’était pas le cas? On pourrait par exemple taxer la pollution due à l’excès de pesticides épandus par les agriculteurs conventionnels. Les recettes de cette taxe financeraient le «renforcement des exigences» en terme de seuil d’OGM toléré en bio. Rappelons encore une fois qu’aujourd’hui, l’agriculture conventionnelle, basée sur le pétrole, est sous perfusion des aides de la politique agricole commune. Celles-ci pourraient être réorientées vers l’agriculture biologique. Laquelle nous ferait économiser de l’argent (via une baisse de la facture d’eau par exemple, puisque les coûts de dépollution seraient moindres).  En résumé, le mieux est de ne pas répondre à cette question. Répondre oui reviendrait à cautionner l’idée que coût des contrôles supplémentaires = prix plus élevé pour les consommateurs. Répondre non serait prendre le risque que la Commission européenne ne renforce pas la réglementation bio en matière de présence d’OGM.

Alimentation des animaux (Q. 4.12 à 4.15) : rappelons-nous que la bio fait sens lorsqu’elle est locale et de saison (sans parler des aspects sociaux, ignorés royalement dans cette consultation). La nourriture des bêtes devrait provenir au maximum de la ferme où elles sont élevées et l’importation de protéagineux, minime voire inexistante.

Q 7.3. «Seriez-vous d’accord pour que les opérateurs de la filière biologique ayant de bons antécédents en matière de respect des règles soient inspectés moins souvent par exemple tous les 2 ou 3 ans ?»
-> Décidément, l’Europe cherche à faire des économies. Dans un contexte où la confiance s’émousse quant à l’origine et la nature des produits, où un cheval passe pour du boeuf et le consommateur pour un pigeon, est-ce une bonne idée d’affaiblir encore plus les contrôles d’un label censé garantir des pratiques bonnes pour l’environnement et notre bien-être ? La réponse est évidemment non.  

Pour en savoir plus sur la Pac et contacter un député : voir ici

La consultation en vue du réexamen de la politique européenne relative à l’agriculture biologique

Ci-dessous en téléchargement, les suggestions de la FNAB pour répondre au questionnaire :

Partager

À votre tour, contribuez à écrire notre histoire collective !

Envoyez-nous vos textes, vos articles, partagez vos points de vue sur les sujets qui vous animent !

Articles liés