Le documentaire franco-allemand « Cultures en transition », réalisé en 2011 par Nils Aguilar, a été projeté en février 2013 à Paris, lors du festival du film d’environnement.
« Cultures en transition » est donc un docu qui parle de transition. Mais en transition vers quoi, vers où ?
En transition vers une agriculture où les arbres et le bétail, supprimés depuis bien longtemps, sont réintroduis sur les parcelles cultivées. Les agronomes en sont désormais persuadés, les arbres améliorent les rendements «60% supérieurs pour une surface présentant des rangées de blés et d’arbres en alternances, que pour la même surface nue» et le fumier issus des déjections animales est nécessaire pour nourrir le sol en matière organique. Sans ça, «le sol meurt, il n’y a plus de micro-organismes ni de vers de terre, les sols se tassent, ne retiennent plus l’eau et sont lessivés vers les rivières à une cadence inquiétante».
En transition vers un futur où nous ne serions plus totalement dépendant du pétrole. Transport des aliments aux quatre coins du monde, mécanisation des pratiques agricoles (tracteurs et autres machines), production d’intrants chimiques… A la prochaine crise, que fera-t-on ? On s’inspirera de Cuba. Un bel exemple de transition agricole, qui s’explique par un embargo sur le pétrole posé par les Etats-Unis en 1962. Pour lutter contre la menace de famine qui pesait sur le pays, les Cubains ont mis en application au cœur des villes les techniques de l’agroécologie (rotation des cultures, plantes qui attirent les insectes ravageurs, animaux etc.). Actuellement, les habitants de l’île seraient auto-suffisants en alimentation à 70%, selon les auteurs du film !
En transition vers des villes où ce sont les citoyens qui ont le pouvoir et qui prennent leur consommation en main. De nombreuses initiatives ont déjà vu le jour, notamment en Angleterre. L’agriculture urbaine n’est plus sous-estimée mais prend toute sa place ; les habitants se livrent avec bonheur, tous ensemble, au jardinage et à la récolte des fruits et légumes. Tout le monde y trouve son compte : un lien social, des produits sains, la redécouverte du travail manuel, le plaisir de travailler la terre et tant d’autres choses. La ville de Totnes s’est d’ailleurs proclamée ville en transition et se transforme petit à petit, modelée par les idées des habitants qui se réunissent régulièrement pour discuter de la direction qu’ils veulent prendre. Pas besoin d’experts, de la bonne volonté à suffit pour créer et multiplier les circuits courts, se doter d’une monnaie locale, recycler, échanger, mettre en place des jardins partagés, changer les modes de déplacement, produire de l’énergie etc.
En transition vers un monde où Monsanto ne pourra plus se présenter comme sauveuse de l’humanité et seule à posséder le pouvoir de nourrir la planète, grâces à la biotechnologie végétale. Un monde où la firme ne pourra plus affirmer qu’elle rend les paysans indiens heureux, que le RoundUp est bon pour l’environnement et que la production d’OGM est la seule voie à suivre !
Non, pour sauver l’avenir de la planète, il suffit de garder un peu d’humilité et de prêter à nouveau attention au fonctionnement de la nature. Afin de s’en inspirer toujours plus.
Eva Bonandrini