Au fil des interviews de spécialistes du secteur agroalimentaire en France, en Allemagne et en Belgique (nutritionnistes, industriels, ONGs, chercheur.se.s, etc.), les journalistes Martin Blanchard et Maud Gangler nous livrent une enquête riche et édifiante sur la face cachée des pratiques d’élaboration des produits « ultra transformés », qui depuis plusieurs années ont rempli les rayons de nos supermarchés.
- La recette très élaborée du cordon bleu
Avec l’aide d’un laboratoire alimentaire spécialisé en recherche et développement, les reporters se sont lancés dans la production d’un plat courant dans les menus pour enfants : le cordon bleu. On découvre alors que pour le produire industriellement, il ne faut pas moins de 30 ingrédients contre 5 lorsque fait maison. Problème, cette liste d’ingrédients est interminable et bien souvent incompréhensible : « préparation de viande », dextrose, fibres de blés, protéines de soja, et additifs à la pelle : E171, E 452, E 407, et plus encore… Ces derniers sont partout et d’une incroyable variété, et se retrouvent même du côté des produits végétariens.
- On ne cuisine plus, on fabrique
En France, plus de 300 additifs sont autorisés dans nos assiettes. Ils jouent un rôle dans la conservation des aliments, mais aussi pour l’amélioration du goût, de la texture et de l’aspect visuel. Pourtant, face à ce cocktail détonant, il est encore difficile de prévoir leurs effets sur la santé à long terme. De plus, l’alimentation industrielle, et la jungle des additifs qui s’y rattache, reste un marqueur d’inégalités face à l’alimentation. Plus il y a d’additifs ou d’ingrédients reconstitués, moins le produit est cher. Ainsi, les personnes en situation de précarité sont aussi les plus touchés par la malbouffe, et donc par les maladies métaboliques associées (diabète, surpoids, obésité…)*.
- Un pouvoir grandissant des consommateurs
Désormais, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour alerter et faire prendre conscience des dangers que représentent la consommation d’additifs. Sous l’impulsion des ONGs, des consommateurs et d’applications comme Yuka, qui fait trembler le secteur de l’agroalimentaire, certains industriels vont jusqu’à changer leur recette pour retrouver une « clean label » aux yeux du grand public. L’utilisation des additifs dans les aliments industriels a ainsi globalement diminué en dix ans. Le cas le plus flagrant est l’apparition dans les rayons de jambons sans nitrites.
- Le danger des additifs. Retours sur l’interdiction du E171
Ce documentaire est diffusé un an après l’entrée en vigueur de la suspension de l’additif E171 en France (renouvelée en 2021). Cette suspension avait été obtenue après un long combat des associations mobilisées sur ce sujet, face aux lobbies de l’agroalimentaire. Derrière l’étiquette E171 se cache le dioxyde de titane. Cette poudre blanche est copieusement utilisée dans l’agro-industrie – notamment dans les sucreries et bonbons de nos enfants – parce qu’elle colore, blanchit, et améliore l’aspect et la brillance des produits. Mais le dioxyde de titane contient des nanoparticules, c’est-à-dire des particules dont la taille est inférieure à 100 nanomètres. Elles pénètrent ainsi dans l’organisme, notamment dans le système digestif, et c’est pourquoi le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), l’a classé « cancérigène possible pour l’homme » lorsqu’il est inhalé.
La suspension de l’E171 pourrait revenir sur la table courant 2021, au niveau européen, avec d’un côté la publication attendue d’un avis de l’European Food Safety Authority (EFSA) minimisant les risques et de l’autre, des publications scientifiques qui au contraire continuent de mettre en évidence des effets indésirables sur la santé.
Ce documentaire permet donc de donner des clés de compréhension du système agroalimentaire dominant, pour nous permettre de mieux choisir. Nos choix de consommation orientent les méthodes de production : à nous de privilégier, lorsque nous le pouvons, les producteurs locaux, bio, les produits frais et de saison, et d’éviter autant que possible les produits ultra-transformés.
A voir, revoir et partager absolument !
Ce documentaire « La grande malbouffe » est disponible sur Arte.tv
* Source : étude ABENA de 2011-2012, « Alimentation et état nutritionnel des bénéficiaires de l’aide alimentaire »