Plus de la moitié des terres que l’Europe consomme vient d’ailleurs

Près de 60% des terres que l’Europe utilisait en 2004 pour subvenir à ses besoins se situaient sur d’autres continents. Le désir de déploiement des agrocarburants, donc des cultures comme celles du palmier à huile, devrait accentuer l’accaparement des terres par les plus riches.

 
L’Europe surconsomme les terres planétaires. Une étude des flux invisibles de terres dans le monde, menée par le Sustainable Europe research institute (Seri) et les Amis de la Terre, montre que l’Europe des 27 aurait consommé 640 Mha de terres en 2004, soit 1,5 fois sa propre surface. Parmi ces terres, 375 Mha, soit 58%, ont été empruntées à d’autres pays : Chine, Russie, Brésil et Argentine surtout. L’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie, la France, les Pays-Bas et l’Espagne font partie des 10 pays qui importent plus de terres qu’ils n’en exportent, pour leurs besoins nationaux. Par « besoins en terres », les auteurs entendent « la somme des terres qu’un pays consacre aux productions destinées à sa consommation domestique, et de celles qu’il "emprunte" aux autres pays, du fait de l’importation de produits comme les denrées alimentaires ou les vêtements, déduction faite de celles consacrées aux produits d’exportation ». L’étude s’est ainsi focalisée uniquement sur les importations de produits agricoles et forestiers. En sont donc exclus les importations minières et industrielles.
 
A quoi sont dédiées les terres importées ? D’abord, à nourrir les animaux d’élevage, selon le Seri (pâturages, cultures de soja par ex.). Ensuite, viendrait l’alimentation humaine (conserves de poissons ou de légumes, riz, céréales, sucres, jus de fruits, fruits déshydratés, farines, graines, etc). Une partie importante des terres importées est consacrée à la sylviculture : des terres qui produiront, entre autres, nos vêtements (coton, laine), chaussures, sacs à main, matériaux de construction et de papeterie (bois), tabac, alcools, etc.
Un Européen consommait en moyenne 1,4 ha de terres en 2004. C’est trois fois plus qu’un Chinois, avec 0,4 ha, et 14 fois plus qu’un Bangladais (0,1 ha).  «La surconsommation en Europe est l’un des plus puissants moteurs de l’accaparement de l’espace écologique des pays du Sud par les pays riches. Dans un monde où la quantité de terres est limitée, la surconsommation des uns signifie l’impossibilité pour d’autres de répondre à des besoins fondamentaux comme cultiver la terre pour se nourrir», déplore Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes chez les Amis de la Terre France. 
Cette surconsommation des espaces pour l’agriculture et la foresterie s’est accentuée au fil du temps. L’étude montre qu’entre 1997 et 2004, la surface de terres importées par les Etats-Unis a quasi-doublé, passant de 130 Mha à 240 Mha. Celle de l’Europe des 15 a grimpé de 255 à 310 Mha. L’accaparemment des terres par les plus riches n’est pas près de s’arrêter, « du fait de la demande croissante en agrocarburants », selon les Amis de la Terre. Dans une feuille de route publiée le 20 septembre 2011, la Commission européenne propose que les entreprises, scientifiques, ONG et autorités locales et nationales s’investissent dans la création d’indicateurs d’utilisation efficace des ressources naturelles: « […]sur l’eau, les terres, les matières premières et le carbone, et d’indicateurs mesurant les incidences sur l’environnement et notre capital naturel ou nos écosystèmes, tout en prenant en compte les incidences globales de la consommation de l’UE ».  
 
Sources :
– Europe’s global land demand, du Sustainable Europe Research Institute (Seri)
– Les Amis de la Terre
– Site de la Commission européenne

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